Du gros transistor aux smartphones en passant par les petits émetteurs portatifs, la radio sait s’adapter à son époque. À chaque génération elle épouse les habitudes de ses auditeurs. Depuis une décennie et face au séisme « Internet », elle est sortie timidement mais sûrement du poste et touche désormais tous les sens, grâce aux formats multimédias. Elle se voit, se touche, s’anime en dessins, en vidéos et autres gifs. Sur les réseaux sociaux, elle bat des records d’audience.
Déjà centenaire, dans cinquante ans, la radio se conjuguera certainement en podcasts, flashs ou en algorithmes. De nombreuses facettes qui laissent transparaitre ce que sera la radio en 2067 et auxquelles réfléchissent d’ores et déjà de nombreux journalistes et chercheurs. Chacun à leur manière ils explorent plusieurs pistes et autant de questions pour démasquer la radio du futur.
Les exigences du multimédia : la radio augmentée et sociale
Actuellement, le son ne suffit plus. Et dans 50 ans ? Augmentée de vidéos ou de contenus multimédia, la radio se décline d’ores et déjà sur tous les réseaux sociaux. Une exigence incontournable pour ne pas perdre le média dans l’abîme du web. Pour Mickaël, journaliste au service multimédia d’Europe 1, c’est une manière de s’adapter au monde numérique qui nous entoure. Albino Pedroia, directeur associé chez Lab Radio, imagine une radio augmentée à la croisée entre l’image, la vidéo, l’écriture, mais qui ne perd pas son âme. « La radio a une chance énorme sur les autres médias, c’est qu’elle peut évoluer sans changer, sans bouleverser son format principal qui est le son ».
Smartphones : les applications et les nouvelles technologies radiophoniques
Déjà vintage en 2017, le transistor sera archaïque en 2067. Écrasé par le rouleau compresseur du smartphone et sa ribambelle d’applications, la radio est aujourd’hui ultra portative. Les nouvelles du Chili ou les émissions vietnamiennes sont désormais à portée d’oreilles, à n’importe quel moment. La radio du futur sera intégrée dans tous les objets du quotidien et donnera accès à des millions de programmes grâce à des technologies qui risque de chambouler les usages des auditeurs. Robots et algorithmes seront les nouveaux collègues des journalistes. Pour Aymeric Parthonnaud, journaliste au service multimédia à RTL, il faudra s’adapter aux innovations que l’on ne pourra pas toujours contrôler. Albino Pedroia imagine, lui, une radio numérique qui nous permettra une écoute personnalisée et à la demande.
Le flash contre le podcast : la bataille des formats et un traitement de l’information bouleversé
L’immédiateté est devenue quasi vitale pour les médias actuels. Impossible de revenir en arrière ni même de ne pas suivre la tendance pour la radio selon Aymeric Parthonnaud. Demain, c’est un paradoxe qu’elle pourrait vivre : assurer des contenus toujours plus courts (de moins d’une minute) pour correspondre à la durée d’attention toujours plus fragmentée des auditeurs mais aussi mettre en place des podcasts pour des contenus plus longs. Deux types de formats opposés, deux facettes de la radio en 2067 pour répondre à toutes les demandes selon Laurent Frisch, directeur des nouveaux médias à Radio France.
Des auditeurs acteurs et des journalistes multitâches du futur
Si la radio change, c’est avant tout pour satisfaire ses auditeurs et s’aligner sur ses habitudes. Plus actifs et moins captifs, ceux-ci interviennent de plus en plus dans les émissions via les réseaux sociaux et pourquoi pas des plateformes qui les mettront directement en contact le journaliste. Être au plus près du public et interagir directement avec lui tout en assurant un travail journalistique de qualité, c’est la quintessence de la radio du futur pour Laurent Guimier, directeur de France Info. « La radio a toujours eu deux caractéristiques, bien avant l’arrivée d’Internet. C’est d’être interactive (…) et sociale ». Comme lui, Laurent Frisch estime que la radio doit être avant tout sociale et interactive et ce avant tout grâce aux réseaux sociaux.
La radio : un morceau d’un média unique ?
Submergée dans le tourbillon des nouveaux médias, la radio pourrait muter, le multimédia conduisant à l’émergence d’un seul et même média, fusion de la télévision, de la presse écrite, du web et de la radio. C’est ce qu’imagine Aymeric Parthonnaud. « Ces grandes séparations qu’on voit aujourd’hui par média, par thème, tout va disparaître en fin de compte. La télévision va devenir plus écrite et plus sonore, la radio va devenir plus visuelle et plus écrite, et l’écrit va devenir plus vidéo et plus sonore ». Ce changement, Laurent Guimier le prépare d’ores et déjà. Il a participé à la création de Franceinfo en septembre 2016, fusion de la radio et de la télévision d’information publiques. Pour ce dernier, « l’innovation est obligatoire si on veut continuer à aller là où se trouve le public ».
La radio a déjà entamé ces mutations. Les suivra-t-elle ou sera-t-elle happée par d’autres innovations futures ? Robots et journalistes en décideront.
Clarisse Martin et Manon Derdevet